Les soignants en EHPAD vieillissent aussi

Porter son regard vers les soignants en EHPAD permet de rencontrer de nombreuses générations de soignants. S’intéresser à la génération vieillissante apparaît important en termes de démographie,  de santé au travail, de potentiel de transmission, de respect du travail accompli avec amour  et de réflexion sur l’avenir du métier.

Les soignant(e)s qui actuellement ont plus de 50 ans ont commencé leur carrière très jeunes et dans des conditions différentes des conditions actuelles. 

Certes le matériel était moins performant, certains soignants ont fait une formation après avoir été agents des services hospitaliers, beaucoup n’ont pas bénéficié dans leurs débuts de formation ergonomique, la majorité a été exposée à des ports de poids importants et des mobilisations répétées pendant  de nombreuses années. 

C’est un début d’explication aux difficultés du présent sur le plan physique et psychique.

Il s’ajoute le fait que les résidents en EHPAD ont changé de profil par rapport à il ya 20 ou 30 ans : ils sont plus âgés, plus atteints dans leur intégrité, moins autonomes voire grabataires. 

Les nombreuses années de travail ont souvent entrainé des fragilités rachidiennes, tendineuses, articulaires faisant suite éventuellement à des accidents de travail ou s’intégrant dans une maladie professionnelle. 

Les nouveaux outils améliorent les postures mais les poids restent y compris celui du lève- malade à déplacer et travailler en binôme n’est pas toujours possible compte tenu du ratio résident /soignant.  De plus les résidents plus âgés sont souvent plus opposants voire plus agressifs ce qui accentue les tensions.  Le contact quotidien avec des personnes âgées retentit sur le psychisme. Plus on vieillit, plus on se rapproche des résidents et ce ne sont plus des grands parents mais des parents que l’on soigne avec un effet miroir.  

L’irruption du COVID a souvent modifié les organisations et diminué les capacités de présence  des aidants : les horaires et les conditions des visites restent réduits dans certains établissements. Il subsiste partout une vigilance  sur le risque infectieux entrainant une surcharge de travail. 

La gestion actuelle des personnels vieillissants repose sur une adaptation qui trouve très vite ses limites. 

En fonction des effectifs et des incapacités il est dans la mesure du possible proposé un travail en binôme, des restrictions établies par le médecin du travail, des postes différents s’ils sont disponibles, hôtellerie, accueil, animation. 

Mais ces postes sont loin d’être extensibles et ces carrières peuvent s’achever avec beaucoup de conséquences psychiques et financières par un congé de longue durée et/ou une retraite pour invalidité. 

Cela entraine un sentiment d’injustice qui s’ajoute au manque de reconnaissance de ces merveilleux invisibles qui retentit sur l’attractivité de ces métiers pour les plus jeunes. 

Pourquoi ne pas ouvrir le champ des possibles et réfléchir à cette problématique ?  

Ces soignants vieillissants ont un savoir, une expérience, une compétence gestuelle et relationnelle. 

Ne pourrait-on pas se reposer sur ces compétences pour accompagner les plus jeunes, réveiller leur créativité, apporter ce temps du lien humain qui concourt au bien être des soignants plus jeunes et des résidents, améliorer l’autonomie des résidents ?

Ne pourrait-on pas proposer des formations à ces soignants en fin de carrière pour introduire de nouveaux métiers dans l’EHPAD et hors les murs voire intégrer des formations dans un plan de carrière suivant l’âge ? 

Ne pourrait-on pas envisager de partager ces nouvelles compétences entre plusieurs établissements proches géographiquement ? 

Marie Duclos

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